VE - Last letter : Livret 10

Gilbert Bougainvillea et le songe éphémère

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Traduction : Raitei
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Et ainsi, ils chériraient le passage du temps pour l’éternité.

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Le garçon s’éveilla seul dans une chambre bercée par le bruit de la pluie.

Il pleuvait doucement dehors. Le garçon, dont les cheveux avaient la couleur du crépuscule et les yeux d’un vert émeraude, regarda par la fenêtre avec une lueur de contentement.

Aujourd’hui était un jour de pluie. Ce qui signifiait : pas d’entraînement à l’épée ni de tours de terrain à l’extérieur. Ils auraient sans doute cours à l’intérieur. Le garçon était curieux de connaître la suite d’un livre pour enfants qu’il n’avait pas pu finir à cause de l’entraînement.

—— Chouette.

Il lui était interdit de lire avant de dormir. Ses livres lui seraient confisqués si ses résultats en cours particuliers baissaient. Bien sûr, il n’avait pas non plus le droit de cumuler les défaites à l’entraînement à l’épée. Élevé dans une famille stricte, le garçon portait des marques de fouet sur les mains. Il avait été frappé la veille, et la douleur pulsait encore jusqu’à présent.

Son frère aîné s’était enfui pendant l’entraînement, et c’était lui qui avait été puni pour ne pas l’avoir recherché. En l’apprenant, son frère s’était emporté contre leur père, mais avait reçu un coup de poing en retour, et l’affaire s’était arrêtée là. En cet instant même, dans une autre pièce, son frère devait lui aussi savourer ce matin.

— Gilbert.

On frappa à la porte, et le garçon passa la tête dehors, en tenue de nuit.

— Hé hé, on a un jour de repos.

Avec une joue enflée et un œil au beurre noir, son frère lui sourit de toutes ses dents. Quand Gilbert lui demanda si ça allait, il répondit que « ce n’était rien du tout ».

En prenant les mains de Gilbert, il les frotta comme pour les réchauffer.

— Désolé de m’être enfui.

— Hm-hm.

Gilbert secoua la tête.

— Mais je pense que je recommencerai.

— Pourquoi, mon frère ? demanda Gilbert.

— Parce que ça me fout en rogne. Pas seulement le vieux, tout le reste aussi.

Gilbert baissa les épaules. Il comprenait un peu ce que voulait dire son frère. Celui-ci haïssait le destin et les obligations qu’on leur imposait.

— Toi non plus, ne deviens pas leur esclave. Hey, je peux dormir dans ta chambre ? Ils ont confisqué mon matelas pour me punir. Il fait trop froid, j’en peux plus. Ah, et le roman que tu lisais, je peux le lire en premier ?

— Oui, bien sûr, mon frère, répondit Gilbert.

—— Un jour, quand je serai grand, moi aussi je veux essayer de faire les choses que j’aime… pensa Gilbert.

______

L’homme s’éveilla dans une chambre bercée par le bruit de la pluie.

Ce fut un réveil sans entrain. L’humidité devait être élevée. Lorsqu’il tenta de se redresser, il sentit un poids sur son corps. Il tenait dans ses bras une femme magnifique.

Ses cheveux étaient d’or, ses cils dorés, sa peau de porcelaine. Elle dormait profondément. Elle avait des membres longs, élancés, et un corps fin. Elle ressemblait presque à une poupée. Au départ, Gilbert fut surpris de découvrir qu’il partageait son lit avec quelqu’un.

—— Violet.

Et puis, il fut surpris de constater qu’il s’agissait de celle qu’il aimait.

Il l’observa attentivement. Elle dormait si paisiblement qu’il se demanda un instant si elle respirait vraiment. Il approcha son oreille de sa bouche pour entendre sa respiration, puis porta une main à sa poitrine, soulagé. Endormie, Violet ressemblait vraiment à une poupée conçue de toutes pièces.

—— Sa peau est si belle.

Elle était bien trop jeune pour quelqu’un comme lui, qui s’était découvert récemment un cheveu blanc. Ils étaient en couple, mais l’écart d’âge entre eux était grand. Malgré tout, Violet gardait un visage presque enfantin.

—— Elle avait déjà des traits adultes quand elle était enfant.

Certaines personnes, comme elle, finissent par avoir l’air plus jeunes en vieillissant. Peut-être pouvait-on dire que son âge avait fini par rattraper les traits de son visage… puis les dépasser. Désireux d’exprimer un peu d’affection, Gilbert attrapa une mèche de ses cheveux dorés et y déposa un baiser, prenant soin de ne pas la réveiller. Un sourire timide naquit naturellement sur ses lèvres.

— Major, l’appela Violet, les yeux encore fermés.

Ce titre ne convenait plus à Gilbert, mais c’était le premier mot qu’elle prononça. Son ancien grade. Il lui permettait donc de l’utiliser, sans la corriger.

— Je t’ai réveillée ?

— Non, j’étais déjà à moitié éveillée…

Elle se frotta les yeux comme un chaton, puis les ouvrit pour le regarder. Chaque geste d’elle le fascinait.

— Major, vous êtes là, dit-elle d’une étrange manière, sans doute encore un peu dans le flou du réveil.

— Évidemment.

— Cela m’a surprise.

— Je comprends. Moi aussi… Après tout, ce n’est que notre premier jour de vie commune. C’est normal qu’on soit un peu surpris tous les deux.

Il rit doucement et serra davantage Violet dans ses bras. Leur nez se frôla. Comme des animaux, ils s’enlacèrent.

— Pour moi, Major, vous êtes parfois si passionné… que j’ai l’impression… que je vais cesser de fonctionner.

— Pourquoi parles-tu en hachant tes phrases, Violet ?

— Très probablement… à cause de la gêne.

— Je vois. Tu es nerveuse. Laisse-moi voir ça.

— Non. Je ne peux pas.

— Laisse-moi.

— Je ne peux pas.

Violet détourna le visage, tentant de le dissimuler dans ses mains pâles. Gilbert rit et l’enlaça à nouveau. Rougissante, comme pour protester, elle attrapa un oreiller et le plaça entre leurs visages.

— Qu’est-ce que c’est ?

— Une barrière.

— Je ne peux pas t’embrasser pour te dire bonjour avec ça.

— C’est une barrière.

— Violet, tu ne m’aimes plus ?

— Ce n’est pas ça.

— Alors pourquoi cette barrière ?

— Mon visage… J’ai celui du réveil.

Elle laissa timidement dépasser sa tête de derrière l’oreiller.

— Ce serait problématique si je vous le montrais, que vous le trouviez bizarre… et que vous vous mettiez à me détester.

Gilbert balança l’oreiller et vola les lèvres de Violet sans poser d’autre question. Dehors, la pluie continuait à tomber. Il leur fallut un long moment avant de sortir du lit, et leur petite lutte intime se prolongea jusqu’à midi.

À midi, Gilbert prépara un repas et ils mangèrent ensemble. Comme la pluie ne cessait pas et qu’ils étaient tous deux en congé, ils passèrent leur temps assis sur le canapé à lire des livres.

La journée fut passée à faire ce qu’ils aimaient.

***

Depuis la diligence, le garçon observait le paysage à travers la fenêtre.

Jamais il n’avait tenté de vivre une seule journée en toute liberté. Pour Gilbert, qui portait le sang des Bougainvillea, une famille renommée pour avoir produit d’innombrables soldats d’élite, tout était déjà tracé. Le type de chaussures qu’il devait porter, le tissu de sa veste, l’heure à laquelle il devait se lever, les arts martiaux qu’il devait apprendre, les personnes avec qui il n’avait pas le droit d’être ami… Tout cela avait été décidé à l’avance. Le fait qu’il intégrerait l’académie militaire au printemps avait également été scellé dès sa naissance.

Il avait fait affréter une diligence pour aller voir sa future chambre au dortoir, mais seul un majordome l’accompagnait. Ses parents, eux, n’étaient pas venus. Son père était retenu par le travail, et sa mère s’occupait de sa petite sœur, tout juste née.

Quant à son frère, il avait déjà fui le domicile familial et nul ne savait où il se trouvait. Il avait envoyé une lettre à Gilbert seul, dans laquelle il annonçait s’être engagé dans l’école de la marine, mais depuis, plus aucun signe de vie. Il avait promis de revenir pour célébrer l’entrée de Gilbert à l’école militaire, mais rien ne permettait d’affirmer qu’il tiendrait parole.

Le paysage défilait lentement de l’autre côté de la vitre. De jeunes garçons de son âge marchaient en groupe, riant joyeusement. Des garçons ordinaires. Au lieu d’intégrer l’école militaire, ils prendraient sans doute la relève dans un commerce familial ou exerceraient un métier quelconque. Ils n’étaient qu’en promenade, et pourtant, ils semblaient s’amuser énormément.

Gilbert, qui ne faisait rien d’autre que rester assis dans une diligence, ne trouvait de plaisir en rien.

Quand le cocher lui demanda s’il souhaitait faire une halte quelque part, aucun lieu ne lui vint à l’esprit. Il avait beau être particulièrement doué en géographie et connaître de nombreux noms de lieux, il ne fut pas capable d’en prononcer un seul.

Il savait qu’il ne pouvait pas fuir.

S’il se mettait, par exemple, à parler ici de ses conflits intérieurs, de ce qui le rongeait, on le qualifierait de faible. Il serait exclu de la famille, et ses responsabilités d’aîné seraient reportées sur les futurs maris de ses sœurs cadettes, encore toutes petites.

Si cela arrivait, même si ses sœurs tombaient un jour amoureuses de quelqu’un, elles ne pourraient pas suivre leur cœur, et seraient contraintes d’épouser un homme qu’elles n’aimeraient pas.

La meilleure solution était donc que Gilbert endure. C’était ainsi que le monde pouvait continuer sa vie sans heurt. De toute façon, Gilbert ne se considérait pas comme précieux. À ses yeux, s’il y avait quelqu’un destiné à disparaître, ce devait être lui.

Il aperçut un couple âgé qui se promenait parmi les arbres, et, sans vraiment savoir pourquoi, il leur en voulut.

Il se mit à pleurer.

______

Depuis la diligence, l’homme observait le paysage à travers la fenêtre.

Aujourd’hui était un jour de liberté. La verdure au-dehors était splendide. Lorsqu’il tourna la tête, il découvrit, tout près de lui, quelqu’un d’encore plus beau. C’était sa bien-aimée. La diligence s’arrêta en lisière d’une vaste forêt, et tous deux descendirent, portant un panier de pique-nique imposant.

Ils n’avaient pas pu venir l’autre jour à cause de la pluie, mais le choix de ce jour s’avérait peut-être une heureuse décision. Un voisin leur avait dit qu’on pouvait voir des montgolfières aujourd’hui.

— J’ai déjà volé à bord d’un chasseur, mais jamais en montgolfière. Et vous, Major ?

Violet et Gilbert avaient étendu une grande couverture sur l’herbe, et s’étaient allongés dessus, le regard tourné vers le ciel. Les sandwiches maison et le thé que contenait le panier avaient déjà été consommés. Tous deux étaient de petits mangeurs, mais ils avaient l’impression d’avoir mangé bien plus que d’habitude. Était-ce parce qu’ils passaient un moment insouciant en pleine nature, rien que tous les deux ?

— Jamais. J’aime la vitesse des chasseurs, mais ils ne sont pas faits pour admirer le paysage. Cette personne là-bas a l’air de bien s’amuser. On devrait essayer ensemble, un jour.

Un petit ballon rouge flottait au loin, dans le ciel.

— J’ai quelques inquiétudes concernant la sécurité.

— En effet. Personne n’a pensé à les rendre pare-balles.

D’un naturel militaire, le couple s’engagea dans une conversation pour le moins étrange. Ils avaient du mal à croire que des gens montaient vraiment dans ces engins. Lorsqu’il partagea son avis selon lequel on mourrait aussitôt si on se faisait tirer dessus en vol, Violet répondit : Moi aussi, c’est ce que je me disais.

— Je doute que l’on puisse en profiter si l’on doit passer son temps à craindre un tireur embusqué. Et si on optait plutôt pour une balade à cheval ?

— Facile de fuir à cheval. Et on peut aussi les manger en dernier recours. Décision rationnelle.

Le silence.

— Quand nous avons dû abattre un cheval militaire pour le manger, Major, vous aviez l’air triste. Je vous prie de m’excuser. C’était déplacé de ma part.

— Non. C’était… l’époque qui voulait ça…

— Oui. Une époque qui voulait ça…

Parce que c’était « l’époque voulait ça » on avait pardonné bien des choses. Leur relation, par exemple.

— Violet…

Gilbert voulut lui demander pardon. Mais il s’interrompit en cours de phrase.

— Tu n’as pas froid, au fait ?

Après tout, ils vivaient déjà ce temps d’après, le temps où le pardon lui avait été accordé.

***

Le jeune homme observait les gouttes d’eau glisser le long des pétales d’une rose.

Cela faisait plusieurs minutes qu’il restait ainsi. Le vase posé sur la table ne lui répondait évidemment pas. Sa compagne, une fiancée choisie par ses parents, et de surcroît transmise par son frère aîné pour des raisons d’héritage, semblait s’ennuyer. Il était évident qu’ils ne se voyaient pas par désir mutuel. Plutôt que de passer ce précieux jour de congé de l’école militaire à la rencontrer dans un café, il aurait cent fois préféré le passer dans la chambre de son tout premier véritable ami, rencontré là-bas.

—— Je me demande ce que fait Hodgins.

Les jeux de cartes et les veillées dont Hodgins lui avait parlé ne l’attiraient pas tant que ça, mais Gilbert appréciait sa compagnie, et le simple fait de partager un repas avec lui était un plaisir. Cette relation, parfois mal vue par les instructeurs, ne lui donnait nullement envie d’y renoncer.

—— De toute façon, il a d’autres amis que moi. Il s’en sortira très bien sans ma présence.

Quelque chose d’« intéressant » avait enfin fait irruption dans la vie de Gilbert. Et cette chose, c’était Claudia Hodgins. Avec la tête entièrement tournée vers son ami, il ne pouvait décemment mener une conversation plaisante avec une jeune fille de son âge.

— Hum, je vais prendre congé.

Ces mots vinrent de sa fiancée, au bout d’un certain temps. Ce fut à cet instant que Gilbert revint à la réalité.

— Excusez-moi… J’étais un peu dans la lune… alors même que je suis avec vous.

— Non… J’étais contente de vous voir. Et le thé était très bon aussi.

— C’est vrai. La nourriture était excellente également.

Quand il l’escorta à l’extérieur, un domestique de sa maison attendait à une courte distance.

— M. Gilbert… Pensez-vous pouvoir les convaincre ?

— Si j’ai encore un peu de temps. Je suis étudiant, je n’ai aucun poids dans cette affaire.

— Je vois… moi non plus.

— C’est une décision de nos parents. Cela prendra du temps, sans doute, mais tâchons de les convaincre de revenir dessus.

— Oui… Hum… Je suis vraiment heureuse… que ce soit vous qui soyez devenu mon fiancé, M. Gilbert.

Gilbert esquissa un léger rire, bien qu’il n’en éprouvât aucune joie. Car il savait qu’il n’était, pour elle, rien de plus qu’un pion que l’on plaçait là où cela était le plus arrangeant.

— En ce qui me concerne… je pense que mon frère a toujours tout mieux réussi que moi.

Sa fiancée inclina la tête, puis se mit à rire doucement, quelque peu embarrassée.

______

L‘homme observait les gouttes d’eau glisser le long des pétales d’une rose.

Un parfum frais et délicat s’échappait du bouquet qu’il venait d’acheter. Il se sentait étrangement gêné, debout sur la place, non loin de chez eux, les yeux rivés au sol depuis le début.

C’était la première fois de sa vie qu’il achetait un bouquet de roses rouges.

Le moment de l’achat avait été plus embarrassant que tout. Il avait bien offert des fleurs à ses sœurs et à sa mère auparavant, mais jamais des roses rouges.

—— Sans doute parce que…

Il avait toujours eu l’idée qu’un tel bouquet était destiné à être offert à une personne aimée. Il avait tant réfléchi à ce qu’elle penserait en les recevant sans raison apparente qu’il en avait été presque paralysé.

—— Des fleurs violettes auraient peut-être été mieux ?

Sa bien-aimée ne les refuserait sans doute pas, mais elle risquait fort d’arborer une expression perplexe. C’était tout à fait son genre.

—— Mais c’est ce que je voulais lui offrir. Tant pis.

S’il était animé à 30 % par le désir de lui offrir quelque chose par plaisir, les 70 % restants relevaient de l’envie irrépressible d’offrir ces fleurs-là, précisément, à la personne qu’il aimait. Même maintenant, alors que ce souhait brûlait toujours en lui, il ne pouvait s’empêcher de redouter que ce geste la mette mal à l’aise.

Mais après tout, elles étaient déjà achetées. Il avait demandé au fleuriste un  bouquet de roses, avait même choisi avec soin la couleur du ruban… Il n’y avait plus de retour en arrière possible.

— Major.

Violet arriva au point de rendez-vous, sur la place. Ils étaient partis ensemble de chez eux, mais s’étaient séparés en route pour régler chacun quelques affaires, avant de se retrouver ici.

— Un bouquet… Vous allez quelque part après ? Je peux porter vos affaires si vous le voulez.

Sa bien-aimée, visiblement, croyait que le bouquet était destiné à une visite au cimetière. Gilbert resta figé un instant… puis se mit à rire.

— Non, pas du tout… Je les ai achetées…

Prenant les affaires de Violet, il lui tendit le bouquet.

— … pour les offrir à la personne que j’aime.

De l’autre côté du bouquet de roses, il aperçut les joues de Violet se teinter de rouge, et ses yeux briller doucement.

***

— Major, vos yeux sont ici.

Il fixa la jeune fille soldat qui venait de prononcer ces mots. Elle désignait quelque chose du doigt. Juste devant son doigt blanc, tendu bien droit, se trouvait une broche d’émeraude. Une gemme semblable à celles que possédait Gilbert Bougainvillea, désormais membre de l’armée de Leidenschaftlich, depuis sa naissance.

La jeune fille soldat le regarda avec une intensité qui semblait transpercer ses yeux magnifiques, empreints de tristesse.

— Je me demande comment on dit la chose.

Depuis l’époque où elle n’était encore qu’une orpheline à peine capable de parler, elle avait parfois ce genre de manière d’être. Quand elle ne trouvait pas le mot juste, elle avait du mal à s’exprimer. Au début, il crut qu’elle cherchait le nom de la pierre précieuse, l’émeraude, mais il se trompait.

— Quand je l’ai regardée… je me suis demandé quel mot conviendrait…

À cet instant, Gilbert retint son souffle. Il venait de comprendre.

— Jolis…

C’était lui qui lui avait appris à parler. Il lui avait enseigné tant de mots. Pour qu’elle puisse exécuter les ordres qu’on lui donnait. Cette jeune fille, au visage si magnifique, n’était en réalité qu’une bête.

—— Je ne lui ai jamais appris.

Une créature qui, pour une raison ou une autre, ne semblait comprendre qu’un seul mot : tuer.

—— Je ne lui ai jamais appris.

Leurs échanges se limitaient donc, naturellement, à cela :

« — Tue.

— Oui.

— Tue.

— Oui.

— Tue.

— Oui.

— Tue.

— Oui.

— Tue.

— Oui. »

Bien sûr, il lui avait aussi enseigné des habitudes de vie, pour qu’elle puisse survivre après sa mort. On pouvait dire que Gilbert avait fait tout ce qu’il pouvait pour elle. Et pourtant, c’était maintenant sa propre négligence qui lui revenait en pleine face.

—— Je ne lui ai jamais appris.

Il avait su lui ordonner de tuer, mais jamais il ne lui avait enseigné un mot aussi simple que « joli ».

—— Je ne lui ai jamais appris.

Alors qu’elle était une jeune fille faite pour ce mot.

—— Je ne le lui ai jamais dit.

Alors même qu’il l’avait pensé, tant et tant de fois.

—— Je ne le lui ai jamais dit.

Si elle n’avait pas vécu cette vie sur le champ de bataille à ses côtés, elle aurait sûrement reçu ce mot en louange, encore et encore.

—— Elle ne sait pas.

Elle venait tout juste de le découvrir.

—— Elle ne sait pas, et pourtant…

Et pourtant, c’était en regardant la gemme qui ressemblait aux yeux de Gilbert Bougainvillea qu’elle avait prononcé ce mot : joli.

—— Je t’emmène à la guerre, tu le sais ?

Pourquoi avait-elle dit cela ? Elle n’était pas du genre à flatter. Les compliments ne franchissaient jamais ses lèvres. Ce n’était pas dans sa nature. Elle ne disait que la vérité. Elle était incapable de mentir. Elle vivait presque comme une machine.

Et c’est précisément parce que ces mots étaient vrais, et qu’ils venaient du plus profond de son cœur, que cela faisait si mal.

—— Ça fait mal.

Savoir que ce mot, qu’elle aurait dû entendre pour elle-même, elle ne l’apprenait qu’en observant les yeux de son maître. Celui qui lui donnait l’ordre d’assassiner.

 

Il acheta la broche, la lui donna, puis se fraya un chemin à travers la foule nocturne comme s’il cherchait à vérifier quelque chose. Il voulait aller dans un endroit calme. La honte qu’il éprouvât envers lui-même était telle qu’il ne pouvait la supporter.

Éduquer et guider un enfant en temps de guerre relevait déjà de l’épreuve. Mais elle… elle n’était pas une enfant comme les autres. C’était tout simplement « elle ». La jeune fille à qui l’on avait donné le nom d’une fleur. La vierge du champ de bataille : Violet. Aux yeux d’un tiers, Gilbert aurait sans doute été considéré comme un excellent mentor, mais lui-même venait d’être frappé en plein cœur, bien trop douloureusement, par ce qui venait de se produire.

— Major, que dois-je faire de ceci maintenant ?

Elle lui montra la broche qu’elle tenait en main.

— Attache-la où tu veux.

— Je finirai par la perdre.

— Ce sera le cas si tu pars au combat. Tu n’as qu’à la porter uniquement en temps de paix… J’aurais peut-être dû en choisir une de la même couleur que tes yeux…

Mais Violet, la fille soldat, secoua la tête à ces mots.

— Non. Celle-ci était la plus jolie.

Il cessa de respirer devant cette affirmation limpide.

— J’ai toujours trouvé qu’ils étaient jolis…

Je ne connaissais pas le mot, alors je ne l’avais jamais dit. La respiration s’interrompit, comme stoppée net par la douleur, par l’angoisse.

— Vous avez de jolis yeux… depuis le tout début, quand nous nous sommes rencontrés.

C’était comme si cette tendresse suffisait à l’étouffer. Comme si cet amour, si pur, allait l’empêcher de respirer… et le tuer.

______

— Major, vos yeux sont ici.

Il regardait sa bien-aimée, celle qui venait de prononcer ces mots. Ils étaient allés ensemble dans une bijouterie pour choisir des alliances. Une magnifique paire de bagues, dignes d’un couple heureux.

—— Oui, c’est ce que nous sommes censés faire.

Et pourtant, tout cela lui semblait irréel. La boutique était pleine d’amoureux qui s’étaient juré un avenir commun, le bijoutier les attendait avec un sourire bienveillant. Cet endroit existait bel et bien. Lui-même s’y trouvait… et pourtant, rien ne lui paraissait réel.

— Aaah, heu…

Il voulut dire quelque chose, mais les mots se bloquèrent en cours de route. Elle était là, tout près. Malgré son sourire radieux, une voix murmurait dans sa tête : « C’est faux. » Il força un sourire, mais son cœur produisait des sons inquiétants.

—— Quelque chose cloche.

Oui, quelque chose n’allait pas. Il ignorait quoi. Mais il sentait qu’il devait regarder de plus près.

—— Qu’est-ce qui ne va pas ?

Cheveux d’or, orbes bleus, lèvres couleur cerise. Peau immaculée. Membres élancés.

—— Non.

Des membres élancés…

—— Non…

Elle avait des mains.

—— Elle n’est pas censée en avoir.

La femme devant lui était d’une beauté parfaite, sans défaut. Une beauté si éclatante qu’elle semblait irréelle.

—— Ah. Je comprends.

Ce malaise qu’il ressentait… c’était en réalité très simple.

— Violet, que sont devenus tes bras ?

—— Tu es censée les avoir perdus, pendant la guerre.

Aussitôt ces mots prononcés, le sourire de Violet s’éteignit brusquement. Son visage redevint impassible, privé d’émotion.

— Pourquoi as-tu dit ça ?

— Non, c’est juste que… il y a quelque chose de bizarre.

— Ce n’est pas bizarre. Ce n’est pas ce que vous vouliez ?

Gilbert était perdu. Il se mit à transpirer, sa gorge devint sèche. Une goutte de sueur coula jusqu’à l’œil.

Il se le frotta avant de respirer profondément, et le rouvrit.

La bijouterie avait disparu.

— Violet ?

Tout avait disparu.

— Violet.

Tout avait été remplacé par un espace blanc, uniforme.

— Violet. Violet.

Elle aussi avait disparu.

— Où es-tu, Violet ?

Sa bien-aimée n’était plus là.

— Violet !

Celle qui comptait le plus à ses yeux avait disparu.

— Violet !

Elle, qu’il aimait plus que tout au monde, qu’il voulait protéger… pour qui il aurait tout sacrifié.  La femme qu’il aimait plus que quiconque… avait disparu. Il avait tout perdu. Il ne comprenait pas ce qui s’était passé. D’ailleurs, où s’arrêtait la vérité, et où commençait l’illusion ?

—— Ai-je seulement vécu ces jours heureux à ses côtés ?

Gilbert commença à réfléchir. Seul, dans cet espace blanc, vide, à l’image de lui-même. Il se demanda ce qui avait été réel.

—— Nous n’avons jamais eu ces jours heureux.

Elle avait été malheureuse dès leur toute première rencontre. Elle n’avait probablement jamais connu une joie simple et personnelle. La seule fois où il lui avait permis de vivre une journée d’adolescente, c’était lorsqu’il l’avait emmenée en ville, et offert la broche d’émeraude.

—— Alors… que sont ces souvenirs ?

Ces souvenirs heureux, si vivants qu’il pouvait les croire réels… créés avec tant de douceur, comme un contrepoids exact à tout ce qu’il avait vécu auparavant. La réponse était simple. Ce n’était qu’un souhait. Ou peut-être un rêve. Quelque chose de fugace… destiné à s’évanouir. Ce n’était pas la « vérité ». Il n’y avait aucun monde dans lequel Gilbert Bougainvillea aurait connu de tels jours. Aucun monde dans lequel il aurait pu être pardonné.

Il avait disparu après la guerre car il avait jugé que ce serait mieux pour elle, s’il n’était pas là. Il pensait que leur relation était une codépendance, ce qui était mauvais pour elle.

—— C’était exactement ça.

Ils étaient trop différents. L’un beaucoup plus âgé que l’autre et pourtant, celui qui avait le plus de prise sur la vie de l’autre, c’était Violet. Et pourtant, c’était elle qui dépendait de lui. Tout était faussé. Ils n’étaient pas comme un frère et une sœur. Aucun grand frère n’aurait demandé à sa cadette de tuer.

Ils étaient dans une relation de hiérarchie militaire. C’était la seule étiquette qui semblait juste… mais même cela, ils l’avaient dépassée.

—— Notre relation est… Notre relation est… Notre relation est…

C’était comme si deux êtres seuls s’étaient croisés par hasard dans un recoin du monde. La solitude de l’un avait trouvé un écho chez l’autre.

Gilbert s’était pris d’affection pour cette bête magnifique qui, toujours, marchait dans son ombre. Après tout, elle était la seule à l’avoir vraiment regardé. Dans une vie où personne ne l’avait jamais vu… elle avait été la première à le regarder. Et, comme elle le réclamait, Gilbert avait fini par lui rendre ce regard.

Violet chérissait son maître. Celui qui, toujours, acceptait son existence et la guidait avec douceur. Ce sentiment s’apparentait à une forme de foi. Elle était prête à mourir mille fois pourvu qu’il vive. Ses ordres étaient la preuve de sa raison d’être… mais, plus encore que cela, ce qui l’avait rendue heureuse, c’était d’avoir été embrassée par lui, la toute première fois.

Être reconnue la rendait heureuse. Être utilisée par quelqu’un qui la traitait avec bonté la rendait heureuse. Elle voulait être sa bête, pensait-elle.
Si elle ne pouvait pas rester à ses côtés… alors elle préférait ne même pas respirer.

Gilbert était…

Violet était…

… unis par l’amour.


Dans ce monde d’un blanc immaculé, Gilbert versa une larme.

Il ne savait pas pourquoi il pleurait. Était-ce la honte ? La tristesse ? La frustration ? La souffrance ? La douleur ? Voulait-il mourir ? Vivre ? Être pardonné ? Pardonner ? Se plaindre ? Demander pardon ?

—— Non, moi…

Il voulait être pardonné.

À mesure que cette réponse approchait de la vérité, son champ de vision se troubla. Il comprit alors que ce monde allait s’évanouir.

Les larmes débordantes faisaient vaciller sa vue. Sa conscience, elle aussi, commençait doucement à s’effacer.

L’aube allait bientôt se lever.

Le véritable Gilbert Bougainvillea était sur le point de se réveiller. Et à l’instant où il ouvrirait les yeux, il ne se souviendrait sans doute plus de ce rêve.

Ce rêve sans honte.

Ce désir qu’il ait été réel.

Cette absence de repentir pour ce qu’il avait fait.

Il allait tout enfouir, et continuer à vivre.

Sans être aimé de personne.

Sans aimer personne.

—— Et puis, mourir dans la solitude.

***

L’homme s’éveilla dans une chambre bercée par le bruit de la pluie.

Ce fut un réveil sans entrain. L’humidité devait être élevée. Lorsqu’il tenta de se redresser, il sentit un poids sur son corps. Il ne parvenait pas à en identifier la cause exacte, était-ce simplement l’âge qui avançait ?

La pièce était vide, personne d’autre n’était là. Il disposait d’un grand lit, rien que pour lui. L’air un peu hébété, il commença malgré tout à se préparer pour la matinée. Sans raison apparente, des larmes coulaient de ses yeux. Il n’y prêta guère attention.

Ses propres émotions ne l’intéressaient pas tant que ça.

Il quitta sa tenue de nuit pour enfiler une chemise et un pantalon, puis sortit de la chambre et se dirigea vers la cuisine. Il fit chauffer de l’eau et prépara du thé. Il y avait des fruits sur la table, mais pas de pain. En y repensant, il se souvint avoir épuisé son stock. Il allait devoir en racheter.

Les êtres humains sont vraiment des créatures chronophages, songea Gilbert.
Il leur faut de l’argent pour vivre, et même une fois morts, encore de l’argent pour leur tombe. Leur corps réclame de la nourriture, même s’ils n’ont pas faim et si c’est le cas, il faut marcher jusqu’à l’épicerie, l’argent en poche. Un organe se fatigue, il faut aller à l’hôpital. Un vêtement se déchire, il faut le recoudre. Et parfois, il y a des jours où accomplir même ces choses simples devient impossible. Par exemple, un matin… après un rêve terrible.

—— Donc je ne l’ai pas oublié.

C’était un rêve, oui. Mais d’une telle vivacité qu’il semblait réel. Honnêtement, il avait du mal à savoir si la réalité était ici… ou là-bas.

Il était sans doute encore à moitié endormi. La conscience allait finir par s’éclaircir. Comme d’habitude, il lui faudrait accepter la réalité et mener la vie exemplaire qu’on avait tracée pour lui. Il avait été façonné ainsi. Il en était capable, il le savait, il l’avait toujours fait. Pour ne pas décevoir, pour se conformer à ce qu’on attendait de lui, il s’était mis un collier au cou et avait accepté son sort.

Même s’il n’en était plus capable, il devait le faire. Jusqu’à la fin.

— …jor.

À cet instant, il entendit une voix. Gilbert faillit lâcher la tasse de thé qu’il tenait.

— Major, vous êtes réveillé ?

C’était une voix qu’il connaissait. Une voix claire, légère et cristalline, qui l’appelait d’un titre qui ne lui convenait plus depuis longtemps.

Chancelant, Gilbert se dirigea vers cette voix.

La poignée de la porte d’entrée s’agitait. Quelqu’un essayait d’ouvrir, sans grand succès, la serrure résistait encore. Gilbert ouvrit la porte d’un geste vif.

— Aaah, Major… Je suis soulagée. Votre teint n’est pas trop pâle.

Et elle était là.

— Je suis allée faire des courses pour le petit-déjeuner. Le Président Hodgins et les autres sont encore au marché.

Le plus « grand amour » de Gilbert se tenait devant lui.

— Ils ont pris un jour de congé pour venir nous voir, ce qui n’était pas arrivé depuis longtemps, et comme cette visite était imprévue, nous n’avions plus rien à manger. Mais ne vous inquiétez pas. J’ai réglé le problème.

Cheveux d’or, orbes bleus, lèvres couleur cerise.

— Major, j’ai caché l’alcool que le Président Hodgins vous a forcé à boire hier soir. Benedict a dit lui aussi qu’il s’était réveillé en se sentant mal, alors essayez au moins de vous limiter au vin de fruits ce soir. Je suis inquiète pour votre état…

Sous sa robe, ses bras mécaniques argentés grincèrent légèrement lorsqu’elle déposa les sacs au sol.

— Major ?

Gilbert ouvrit la bouche et prit une inspiration. Cette fois, pour de bon, il voulait se réveiller de son cauchemar. Et pour cela, il appela le nom de l’être qui partageait désormais sa vie.

— Violet.

Rien qu’en prononçant ce nom, le monde se teinta d’une nuance plus douce.

— Oui ?

Elle pencha la tête, et Gilbert l’enlaça sur le pas de la porte. Sans lui demander la moindre permission.

Jusqu’à présent, il lui avait toujours demandé s’il pouvait l’embrasser, la prendre dans ses bras. Mais pas cette fois.

Il espérait qu’elle lui pardonnerait. Et à sa grande surprise, Violet ne le repoussa pas.

— Major… Qu’est-ce qui… vous arrive… ?

— J’ai eu… un mauvais réveil.

— Oui, Benedict a dit la même chose…

— Je me suis réveillé… avec l’impression que mon rêve et la réalité s’étaient mélangés. Comme si un mensonge et une vérité s’étaient fondus ensemble… pour former quelque chose de laid.

— Quel horrible rêve.

Sa bien-aimée, d’ordinaire si réservée, lui répondit simplement. Et ce ton si franc lui donna presque envie de rire de lui-même.

— Oui, c’en était un. C’est pour ça que j’ai eu besoin de te serrer dans mes bras…

À ces mots, Violet entoura timidement le dos de Gilbert de ses bras pour le prendre elle aussi dans ses bras.

— Merci.

— Non. Il m’arrive aussi de rêver, alors je comprends.

— Toi aussi ?

— Oui. Ce n’est pas fréquent, mais… il y a un rêve que je fais parfois. Un rêve où je ne fais que vous chercher.

— En version plus jeune ?

— Les deux, je crois. Mais peu importe la forme que je prends, au final, je ne vous retrouve jamais. Alors je me surprends à penser ceci : « Si les choses devaient finir ainsi, peut-être aurait-il mieux valu que nous mourions ensemble, ce jour-là. »

Le silence.

— Mais quand je me réveille, Major, vous êtes là. À mes côtés. Endormi près de moi. Je me dis « Ah, c’est vrai. Nous vivons ensemble à présent. Je n’ai plus besoin de le chercher. » Et je me sens soulagée…

Tandis que Violet murmurait cela, Gilbert la regardait en silence.

— Alors je me rapproche de vous, et je me rendors. Je n’ai plus de soucis maintenant.

— Oui.

Finalement, ils se ressemblaient. Gilbert en était certain.

— Que ce soit le matin, la nuit, à l’instant où je perds connaissance ou celui où je me réveille… Je peux m’en assurer. Vous êtes là.

— Oui, c’est vrai, Violet… Maintenant, tout va bien.

En se blottissant l’un contre l’autre, les fragments manquants de chacun formaient un cercle complet. Cela leur donnait la force de vivre dans ce monde ordinaire… et cruel.

Car ils devaient encore continuer à vivre, à partir de maintenant.

— Qu’est-ce qu’on prépare pour le petit-déjeuner… ?

Alors que Gilbert posait cette question avec un sourire apaisé, les commissures des lèvres de Violet se relevèrent, elles aussi.

— Ils sont venus de si loin. J’aimerais qu’on leur fasse honneur.

— Oui, mais tout de même, j’espère que leurs visites à l’improviste s’arrêteront là.

— J’ai été agréablement surprise.

— Oui, mais ça laisse moins de temps seul avec toi. Et nous avions nos propres plans.

— Le Président Hodgins vous apprécie, Major.

— C’est mon meilleur ami.

— Et Benedict semble aussi inquiet de la façon dont nous vivons au quotidien.

— C’est uniquement de toi qu’il s’inquiète, non ? Il m’a donné plusieurs avertissements… même à notre mariage.

— Le Président Hodgins a proposé qu’on fasse quelque chose d’amusant, aujourd’hui.

— Je m’amuse même quand il n’y a que nous deux, tu sais.

— Major, il serait peut-être temps de desserrer un peu cette étreinte… et, hum, de commencer à préparer le petit-déjeuner ?

— J’ai envie de te serrer encore un peu.

À cet instant, Gilbert savait qu’il ne craignait plus rien. Ni la vie, ni la mort.

—— Maintenant que je t’ai retrouvée, mon « plus grand amour », je n’ai plus peur de rien.

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