SotDH T6 - INTERLUDE PARTIE 1

Le Jour de Repos du Démon (1)

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Traduction : Calumi
Correction : Raitei
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Nous étions en mai, la douzième année de l’ère Meiji (1879). Sur la rue Sanjô, un restaurant nommé Au Soba du Démon affichait sur sa porte un écriteau : Fermé pour la journée

Voici donc l’histoire d’un jour de congé.

 

Matin — Les maîtres

 

Même à présent, Jinya continuait de s’entraîner dans la bambouseraie de Sagano. Il s’était habitué à manier deux sabres, mais ses gestes restaient maladroits. Pourtant, il ne voulait pas renoncer à sa seconde lame et s’exerçait chaque matin sans faillir.

Ce jour-là, toutefois, son partenaire d’entraînement était différent.

— Tu manques encore d’expérience.

Jinya se tenait debout, les deux lames en main, parfaitement calme. Heikichi ne répondit pas, ou plutôt, il était trop épuisé pour prononcer un mot. L’entraînement matinal visait davantage à faire progresser Heikichi qu’à servir Jinya. Somegorou voulait donner un peu d’expérience à son disciple, alors il les avait fait s’affronter, même si l’écart entre eux ne laissait aucun doute sur l’issue.

— Eh bien, je m’y attendais, dit Somegorou.

Jinya n’avait pas la moindre égratignure, pas même une goutte de sueur. Ses vêtements restaient impeccables, sa respiration régulière. En face, Heikichi n’arrivait plus à se relever. Il gisait à terre, les bras et les jambes écartés. Face à un démon aguerri par des décennies de pratique, un simple utilisateur d’esprits d’artéfacts sans expérience réelle n’avait aucune chance. Somegorou éclata de rire en voyant son disciple peiner à reprendre son souffle. L’affrontement avait été une bonne leçon.

— Maître… cet homme… n’est pas humain…

— Bien sûr que non. C’est un démon.

— Ce n’est… pas… ce que je veux dire…

Heikichi savait manier les esprits d’artéfacts, mais son manque d’expérience au combat le rendait inoffensif. Il s’appuya sur le sol et s’assit, les jambes étendues sur la terre nue.

— Tu montres un savant mélange d’arts martiaux et d’esprits d’artéfacts, mais il te manque de l’entraînement, dit Somegorou.

— Je le sais, bon sang.

Contrairement à Somegorou, Heikichi se concentrait surtout sur les arts martiaux à mains nues, utilisant ses esprits d’artéfacts pour compenser ses faiblesses. Il s’agissait sans doute pour lui d’une manière de pallier l’absence d’un esprit d’artéfact aussi puissant que celui de Somegorou. L’idée n’était pas mauvaise, mais son art martial comme sa maîtrise des esprits d’artéfacts manquaient encore de finesse. Il savait se battre, certes, mais il lui manquait une manière décisive de conclure un combat.

— Enfin, l’important, c’est de savoir où t’en es. Tu es encore en apprentissage, après tout, dit Somegorou.

— Je comprends, mais je pensais pouvoir faire mieux, même si j’ai appris les arts martiaux en autodidacte. J’arrive pas à croire que je n’aie pas réussi à le toucher une seule fois.

— Désolé, je pouvais pas t’être d’une grande aide là-dessus. Je n’y connais rien aux arts martiaux.

— Pas du tout, maître ! Vous m’avez appris des choses bien plus importantes, bien plus que je ne pourrais en compter !

— Oh, tu es si gentil que j’en aurais presque les larmes aux yeux, dit Somegorou avec un large sourire.

Le respect de son disciple ne faiblissait pas, même dans les domaines où son maître ne pouvait rien lui enseigner. Somegorou lui avait transmis bien plus que des techniques de combat, il lui avait donné de nombreuses leçons de vie. La confiance entre eux était solide.

— Tu tiens vraiment beaucoup à ton maître, dit Jinya.

— Bien sûr que oui ! Mes parents ont été tués par des démons, et celui qui les a vengés et m’a recueilli, c’est mon maître ! Comment pourrais-je ne pas le respecter ?

Jinya connaissait Heikichi depuis un moment, mais c’était la première fois qu’il entendait parler de son passé. Il comprenait à présent pourquoi le jeune homme haïssait autant les démons. Rien que parler à l’un d’eux devait déjà lui peser.

— Je voulais avoir la force de tuer les démons moi-même, mais… je crois que j’ai compris maintenant que tous les démons ne sont pas mauvais.

Gêné, Heikichi détourna le regard. Il s’y prenait maladroitement, mais il essayait de ménager Jinya. Somegorou s’y serait mieux pris, bien sûr. C’était un autre domaine où le disciple avait encore à progresser.

— Tu es un bon garçon, Heikichi, dit Somegorou.

— H…hein ? D’où ça sort, ça ?

Il paraissait un peu excessif d’appeler « garçon » un jeune homme de dix-neuf ans, pensa Jinya. Pourtant, il ne dit rien et observa le maître et le disciple qui se taquinaient. Somegorou remarqua avec surprise un léger sourire sur ses lèvres.

— Tiens donc ? C’est rare. Tu dois être de bonne humeur, pour une fois.

Jinya poussa un léger soupir.

— Je me disais seulement que c’est beau, une relation de maître à disciple.

Somegorou et Heikichi écarquillèrent les yeux. Trouvant leur réaction amusante, Jinya esquissa un autre sourire discret.

— Se consacrer à une seule chose, y dédier sa vie entière, puis transmettre ce savoir à quelqu’un avant de disparaître, créant ainsi une longue chaîne qui s’étend du passé vers l’avenir… C’est justement parce que je vis bien plus longtemps que les humains que je trouve cela noble. Honnêtement, j’en suis même jaloux.

Somegorou était déjà âgé et finirait par disparaître un jour, mais Akitsu Somegorou, lui, ne mourrait pas. Le nom, lui, se perpétuerait.

Jinya avait autrefois rencontré un démon qui trouvait les humains amusants. Leur vie était bien plus courte, mais ils surpassaient les démons parce qu’ils transmettaient leur savoir. Les humains défiaient leur destin comme s’il s’agissait de leur droit de naissance. Il n’existait, disait ce démon en riant, nul spectacle plus fascinant que l’humanité. Jinya comprenait à présent ce qu’il avait voulu dire. Il y avait quelque chose de sacré dans la manière dont les humains faisaient vivre leur héritage. Il en éprouvait de la jalousie, peut-être parce qu’une telle chose lui était désormais hors de portée.

— Je comprends pas trop, mais vous aviez pas un maître, vous aussi ? demanda Heikichi.

Les paroles des anciens dépassaient souvent les jeunes. Jinya fronça légèrement les sourcils, trouvant ses mots un peu saugrenus. Voyant cela, Heikichi précisa :

— Un maître d’armes, je veux dire. J’ai cru comprendre que vous en aviez un. Vous avez l’air d’avoir reçu un bon entraînement.

Jinya se remémora Motoharu et les jours d’entraînement passés avec lui. Les appeler maître et disciple serait exagéré, mais c’était bien de lui qu’il avait appris l’art du sabre. Heikichi n’avait pas tort.

Il ferma les yeux. Ses pensées revinrent vers ces jours lointains, éphémères comme des bulles à la surface de l’eau. Pris d’une douce nostalgie pour sa jeunesse, il se mit à parler.

— Celui qui m’a appris le sabre était mon père adoptif. Il m’entraînait chaque jour, et il était fort. Je ne l’ai jamais touché, pas une seule fois.

— …Pas une seule ? Vraiment ?

— Un démon ne peut mentir. C’était le plus grand bretteur du village, capable de tuer un démon d’un seul coup.

— Je vois. C’était donc votre prédécesseur, alors.

Jinya trouva cette formulation étrange, mais avant qu’il ne puisse demander des précisions, Heikichi poursuivit sur un ton détaché, comme pour converser.

— On vous appelle bien le sabreur qui tue les démons d’un seul coup, non ? Alors je vois pas pourquoi vous êtes jaloux. Vous suivez la voie de votre propre maître, en quelque sorte.

Jinya resta un instant figé. Peu à peu, il reprit ses esprits, sentant monter en lui une émotion inconnue, qu’il n’aurait su nommer ni joie ni exaltation.

— Ah… oui, je vois.

Il avait cru que seuls les humains pouvaient relier le passé à l’avenir, mais tout comme les techniques de Somegorou vivaient à travers Heikichi, quelque chose de Motoharu demeurait en lui. Être devenu un démon n’y changeait rien.

À bien y réfléchir, sa vie avait été marquée par bien des rencontres et des séparations. Ofuu, son père, Naotsugu, et tant d’autres encore l’avaient influencé à leur manière. Une part d’eux subsistait aussi dans le démon qu’il était devenu.

— Pas mal, hein ? Ça c’est mon disciple, lança Somegorou avec fierté.

Ses enseignements avaient fait d’Utsugi Heikichi un homme capable de respecter même ce qui ne se voyait pas. Penser que ce gamin effronté d’autrefois avait tant mûri le remplissait de fierté.

— Je dis ça, mais pas question que tu me le prennes.

— Merci, mais je n’en voulais pas de toute façon, répondit Jinya.

Il enviait un peu les deux hommes, certes, mais pas au point de désirer Heikichi pour lui-même. Quelques mots lui vinrent pourtant à l’esprit, et il les prononça sans hésitation.

— Travaille dur, Utsugi. Je ne reconnaîtrai comme quatrième Akitsu Somegorou que toi.

Cette fois, ce fut au tour de Heikichi de rester sans voix. Il lui fallut un instant pour assimiler ces paroles avant de détourner le regard, à la fois troublé et gêné.

— …D’accord.

Le message était clair. « Tu es digne de porter le nom d’Akitsu Somegorou ». Pour Heikichi, qui respectait profondément son maître, de tels mots représentaient le plus grand des honneurs.

— Ah ah ah ! C’est bien pour toi, Heikichi. Et pour être franc, je n’ai pas non plus l’intention de transmettre le nom d’Akitsu Somegorou à quelqu’un d’autre que toi, ajouta Somegorou.

— …Merci, maître, répondit Heikichi, la voix empreinte d’émotion.

Difficile de lui en vouloir : le maître qu’il vénérait venait tout juste de le reconnaître comme son successeur. Mais Somegorou n’était pas homme à lui rendre les choses faciles. Il esquissa un sourire malicieux et lança :

— Mais faudrait déjà que tu deviennes assez fort pour battre Jinya.

— Hein ?

Heikichi se figea.

— Tu aimes bien Nomari-chan, pas vrai ? Eh bien, il te faudra d’abord l’approbation de son père si tu veux être avec elle… fit Somegorou en jetant un regard à Jinya.

Jinya connaissait l’homme depuis assez longtemps pour deviner ce qu’il attendait. Il n’était pas contre l’idée de jouer le jeu, pour une fois.

— Si tu veux ma fille, il te faudra d’abord me vaincre.

Somegorou éclata d’un grand rire en entendant cette réplique bien ringarde. Même à son âge, il gardait une vivacité d’esprit redoutable.

Heikichi, lui, était au désespoir. La force de Jinya dépassait tout ce qu’un humain pouvait atteindre. Il possédait plusieurs pouvoirs démoniaques et une parfaite maîtrise du sabre. L’idée de devoir vaincre un tel colosse pour pouvoir épouser Nomari suffisait à le faire pâlir.

— Bon courage, Heikichi. T’as encore un long chemin avant de pouvoir conquérir Nomari-chan. Je suis même pas sûr de pouvoir battre ce type, moi, dit Somegorou.

— Je pourrais en dire autant, répondit Jinya. — Cet esprit d’artéfact, Shouki, c’est ça ? Il est impressionnant.

— C’est mon atout majeur. J’sais pas si je pourrais gagner contre toi avec lui, mais je tomberais pas sans livrer un bon combat.

Aucun des deux ne plaisantait. Shouki pouvait abattre un démon supérieur d’un seul coup, et un affrontement direct contre un tel esprit aurait été périlleux.

Heikichi, lui, restait figé, incapable de suivre le fil de leur conversation.

— Je pense qu’on peut s’arrêter là. Je vais nous préparer le petit-déjeuner, dit Jinya.

— Oh, vraiment ? Je prends ça au mot. Je voudrais une soupe miso avec des oignons verts, s’il te plaît. Et toi, Heikichi, tu veux quoi ?

Les deux hommes s’éloignèrent, laissant Heikichi derrière eux.

Après quelques pas, Jinya se retourna. Les lèvres à peine relevées, il lança à Heikichi un regard assuré.

— J’attendrai notre combat, Utsugi. Mais fais attention : je suis plutôt fort.

Heikichi pâlit encore davantage, le visage empreint d’un désespoir absolu.

— …Hein ?

Les amours de jeunesse s’accompagnaient souvent d’épreuves et de tourments. Cela avait toujours été vrai, l’était encore à présent, et le resterait sans doute à jamais. Mais quelle que soit l’époque, le dernier obstacle qu’un jeune homme devait franchir pour être avec la jeune femme qu’il aimait demeurait le même : son père.

 

Midi — Pain aux haricots rouges

 

Après l’entraînement, Heikichi expliqua qu’il avait quelque chose à faire et prit congé. Somegorou, qui avait accepté l’invitation de Jinya et pris son petit-déjeuner au Au Soba du Démon, savourait à présent son thé, tranquillement, après le repas. Jinya et Nomari discutaient lorsqu’un homme entra : Toyoshige.

— Hé, désolé, mais j’aurais besoin d’un coup de main, lança-t-il d’un ton pressé, sans donner plus d’explications.

Leurs restaurants étaient voisins. Ils se connaissaient donc bien. En temps normal, Jinya aurait accepté sans hésiter, mais, malheureusement, il était déjà pris pour la journée.

— Désolé, mais aujourd’hui, ce n’est pas possible.

— Oui, j’ai vu le papier sur la porte. Tu as des projets ?

— Je sors avec ma fille.

— Hein ? Attends, tu as fermé le restaurant juste pour ça ?

— Oui. Pourquoi ?

Toyoshige ne répondit pas, se contentant de grimacer. Jinya ne voyait vraiment pas ce qui pouvait poser problème. Nomari comptait évidemment plus que le restaurant, où était le mal ?

— Comment il peut dire ça avec un air aussi sérieux ? murmura Toyoshige.

— Oh, ça, c’est bien Jinya, répondit Somegorou à voix basse. — Les expressions faciales, c’est pas son fort.

Les deux hommes ne s’étaient jamais rencontrés auparavant, mais ils se mirent à parler comme de vieux amis, unis par leur opinion commune sur Jinya.

— Quoi qu’il en soit, nous sommes occupés pour la journée, dit Jinya. — Je pourrai t’aider une autre fois, mais pas aujourd’hui.

— Je t’en prie, j’ai juste besoin de toi un petit moment.

— Désolé, mais…

Jinya s’apprêtait à refuser de nouveau lorsqu’il sentit Nomari tirer doucement sur sa manche. Elle adressa à Toyoshige un regard compatissant.

— Ce serait bien d’aider un peu, non, Père ?

Elle était prête à repousser leur sortie pour rendre service à leur voisin. Mais c’était justement cette gentillesse que Jinya voulait protéger. Il ne souhaitait pas gâcher la journée qu’elle attendait depuis si longtemps. Comme si elle avait lu dans ses pensées, Nomari lui adressa un doux sourire et dit :

— Mihashi-san nous rend souvent service, n’est-ce pas ? Écoutons d’abord ce qu’il veut, et nous verrons ensuite ce que nous décidons. Nous lui devons bien ça.

— Eh bien… soit, céda Jinya.

Il savait qu’autrefois, elle évitait de donner son avis par crainte qu’il ne la rejette. Les enfants grandissaient décidément bien vite. Fier de la voir ainsi, il sentit un sourire lui monter aux lèvres.

— Alors, qu’est-ce qu’il te faut, Mihashi-san ?

— Je prépare une nouvelle pâtisserie.

— Ah ?

— Oui. D’ordinaire, c’est trop de travail, mais les ventes ne sont pas fameuses ces derniers temps. Si je ne fais pas d’efforts maintenant, je vais le regretter plus tard.

Saku, l’épouse de Toyoshige, était une femme au tempérament bien trempé. Le couple s’aimait sincèrement, mais elle dominait clairement leur relation. Leur boutique, Mihashiya, n’attirait pas encore beaucoup de clients, ce qui devait inquiéter Saku plus qu’elle ne le laissait paraître.

— Mais je ne vois pas bien comment je pourrais t’aider, dit Jinya.

Il savait préparer les soba et les plats de maison, mais il n’avait jamais confectionné de douceurs. Il doutait d’avoir quoi que ce soit d’utile à offrir.

— N’en sois pas si sûr, répondit Toyoshige. — Et j’aurais aussi besoin de l’aide de Nomari-chan.

— Hein ? Moi ? Mais je cuisine à peine, fit Nomari, un peu surprise.

Elle venait à peine de s’exercer aux bases, et Jinya était de loin le plus habile.

Toyoshige éclata de rire.

— Non, non, ce n’est pas de ce genre d’aide dont je parle. J’aimerais que vous soyez mes goûteurs.

Il voulait leur faire tester ses créations, pas les impliquer dans leur préparation. Nul besoin, donc, d’avoir la moindre expérience en pâtisserie.

— Oh, si ce n’est que ça, je veux bien, dit Nomari, soulagée que ses talents culinaires ne soient pas mis à l’épreuve.

— Parfait ! Et toi ? demanda Toyoshige en se tournant vers Jinya, plein d’espoir.

Puisque sa fille avait accepté, Jinya ne pouvait plus refuser.

— Cela ne me dérange pas.

— Merci à vous deux. J’ai d’ailleurs déjà une idée de ce que je vais faire.

— Ah oui ?

Toyoshige affichait un air faussement détaché, comme s’il n’avait cédé qu’à contrecœur à sa femme, mais il semblait bien plus motivé qu’il ne voulait le montrer. Sous le regard attentif de ses interlocuteurs, il déclara fièrement :

— Je vais faire du pain aux haricots rouges.

Son large sourire trahissait sa confiance.

Jinya pencha légèrement la tête, ne connaissant pas de douceur portant ce nom. Toyoshige saisit aussitôt l’occasion pour lancer une explication passionnée.

— Le pain aux haricots rouges est une sucrerie inventée par une confiserie de Ginza, à Tokyo. Il paraît qu’elle est si populaire qu’on en livre même à l’empereur. Vous en avez déjà entendu parler ?

— eh bien, pas vraiment.

— Ah ? Bon, peu importe, répondit Toyoshige, mettant aussitôt fin à ses explications.

Jinya, perplexe, l’incita à poursuivre, mais l’homme fronça simplement les sourcils et ajouta :

— Euh… c’est tout.

Puis, avec un peu plus d’assurance :

— Écoutez, le pain aux haricots rouges est à la mode en ce moment. Ça se vendra très bien, même sans y ajouter ma touche personnelle.

Autrement dit, il comptait tout bonnement copier sans vergogne. Il paraissait terriblement confiant dans son idée, mais difficile de partager son enthousiasme.

— Dis, Jinya, lança Somegorou, — je crois que je comprends pourquoi sa boutique marche pas fort.

— Quelle coïncidence, moi aussi, répondit Jinya.

Somegorou, Jinya et Nomari échangèrent un regard las, mais Toyoshige ne s’en formalisa pas. Il était persuadé que son idée relevait du génie.

— Oui, oui, je sais, j’ai encore frappé fort. Le seul problème, c’est que je ne sais pas du tout comment on fait ce pain aux haricots rouges. D’ailleurs, j’en ai jamais vu de mes propres yeux, dit-il.

— Ah, les choses empirent, commenta Somegorou, que Toyoshige ignora aussitôt.

Jinya se demanda comment il comptait préparer une pâtisserie qu’il n’avait jamais vue, avant de comprendre la véritable raison de sa demande.

— Mihashi-san, corrige-moi si je me trompe, mais quand tu dis que tu veux qu’on goûte tes créations…

— Exactement ! Je n’ai pas la moindre idée du goût que devrait avoir le pain aux haricots rouges, alors je vais simplement en faire jusqu’à ce que vous me disiez que ça s’en rapproche.

— Mais nous non plus, nous ne savons pas quel goût ça doit avoir.

— Oh, c’est pas grave. Choisissez simplement celui qui ressemble le plus à ce que devrait être un pain aux haricots rouges.

Le plan de Toyoshige devenait de plus en plus absurde. Quoi qu’il en soit, l’homme se mit aussitôt à cuisiner.

— Voilà, première fournée.

Toyoshige posa sur la table de petits gâteaux ronds et bruns. Ils étaient assez petits pour être avalés d’une bouchée et dégageaient encore un peu de vapeur, preuve qu’ils sortaient tout juste du four.

— D’après ce que j’ai compris, le pain aux haricots rouges se prépare avec une pâte de blé farcie de pâte de haricots rouges. Dites-moi ce que vous en pensez.

Jinya, Nomari et Somegorou prirent chacun un morceau et mordirent dedans. Ils mâchèrent lentement, goûtant la douceur légère des haricots azuki et la saveur discrète de la pâte.

— C’est pas tout simplement du manjû ? dirent-ils à l’unisson.

La pâtisserie que Toyoshige leur avait servie ressemblait en effet trait pour trait à un manjû.

— La pâte n’est pas terrible…, fit remarquer Nomari, légèrement contrariée.

Elle aimait les douceurs, ce qui rendait son jugement plus sévère que celui de Jinya ou de Somegorou.

— J…je vois. Zut, j’étais pourtant sûr de mon coup. Bon, autre chose !

Toyoshige revint aussitôt avec une nouvelle fournée. Cette fois, le résultat était pour le moins étrange : les gâteaux étaient ronds, mais enroulés de plusieurs couches de sortes de filaments. Rien de bien appétissant.

— …Mihashi-san, qu’est-ce que c’est que ça ? demanda Jinya.

— Bon, la pâte, c’est du blé, non ? Et là, je me suis dit : qu’est-ce qu’on fait d’autre avec du blé ? Des nouilles sômen ! Alors j’ai tenté de faire du pain aux haricots rouges en utilisant des nouilles comme base.

— J’imagine que c’est garni de pâte de haricots azuki ?

— Exactement, répondit Toyoshige sans la moindre hésitation, les bras croisés, débordant de confiance.

— Désolé, mais je n’ai vraiment aucune envie de manger des nouilles au goût de haricots rouges, dit Jinya.

— Oui, je me doutais un peu que ça passerait pas.

Alors pourquoi l’avoir apporté ? songea Jinya avec lassitude.

— Mouais, non, ça le fait pas, dit Somegorou après en avoir goûté un, sans chercher à ménager le pâtissier.

Jinya soupira. S’ils continuaient à encourager les élucubrations de Toyoshige, cette séance de dégustation n’en finirait jamais. Il devait mettre un terme à tout cela s’il voulait encore profiter de sa sortie avec Nomari. Gardant cet objectif en tête, il dit :

— Le pain aux haricots rouges, c’est juste de la pâte de blé farcie de pâte de haricots rouges, n’est-ce pas ?

— À peu près, oui.

— Alors ce n’est pas très différent du kintsuba, non ?

Le kintsuba, aussi appelé kintsubayaki, se préparait en pétrissant de la farine de blé avec de l’eau, qu’on étalait finement avant d’y enfermer de la pâte de haricots rouges. Si le pain aux haricots rouges n’était vraiment qu’une pâte de blé farcie de pâte d’azuki, les deux devaient se ressembler.

— Ah, du kintsuba, hein ? Je vois ce que tu veux dire, mais il paraît que le pain aux haricots rouges, c’est plutôt une sorte de petit pain, donc on ne voit pas la pâte de haricots de l’extérieur, expliqua Toyoshige.

— Et si tu essaies avec une pâte de kintsuba, mais plus épaisse ?

— Mouais, j’ai des doutes. La pâte du kintsuba est bonne justement parce qu’elle est fine.

Le pain aux haricots rouges et le kintsuba semblaient donc être deux pâtisseries bien différentes. Et à bien y penser, mordre dans une épaisse couche de pâte de blé n’avait rien de très appétissant. Restait à imiter le manjû ou une autre douceur… Jinya passa mentalement en revue toutes celles qu’il connaissait, sans rien trouver de convaincant.

— Mais je crois que tu tiens quelque chose, Jinya, dit Toyoshige. — S’inspirer de douceurs existantes, c’est une bonne idée. Attends un peu, j’vais tenter un truc.

Il quitta le restaurant tout excité. L’idée de Jinya semblait avoir fait jaillir une étincelle d’inspiration. Peu après, il revint, rayonnant.

— Cette fois, je les ai faits façon dango.

— Pas mal, dit Jinya.

— Oui, la texture est élastique et le goût agréable, approuva Nomari.

Toyoshige apporta alors une série de nouvelles douceurs, chacune avec une petite touche inventive. Il était assez habile pour que toutes ses expérimentations soient plutôt réussies, dignes d’être vendues dans une confiserie ordinaire.

— Puisqu’il s’agit de blé, j’ai essayé de les cuire un peu pour leur donner un parfum plus agréable, expliqua Toyoshige.

— Tu as pétri la pâte de blé avec de l’eau d’abord, j’imagine ? demanda Jinya.

— Oui, et c’est plutôt réussi. Mais ça doit être bon seulement quand c’est tout frais…, commenta Somegorou.

Ils continuèrent ainsi à goûter diverses pâtisseries, sans pour autant se rapprocher de la moindre idée précise de ce que devait être ce fameux pain aux haricots rouges.

— Bon, j’en ai assez. C’est un peu trop pour un vieil homme comme moi, déclara Somegorou, le premier à abandonner.

Le ventre douloureux après avoir trop mangé, il alla s’allonger dans le salon de Jinya. Ce dernier, lui aussi, atteignait peu à peu sa limite.

— Et toi, Père ? demanda Nomari.

— Je peux encore en manger, répondit Jinya.

Il n’avait rien contre les sucreries, certaines lui plaisaient même, mais en manger autant devenait difficile. Nomari, en revanche, paraissait toujours en pleine forme, sans doute parce qu’elle était jeune. Les jeunes filles semblaient avoir un appétit sans fond quand il s’agissait de douceurs.

— Merci d’avoir eu la patience de supporter tout ça, dit Toyoshige. Mais cette fois, je donne tout ce que j’ai !

Il entra, portant une nouvelle fournée. Cette fois, il s’agissait de gâteaux ronds, faits d’une pâte jaune. Il semblait particulièrement satisfait de son travail, un large sourire aux lèvres.

— C’est encore une pâte de blé, mais j’y ai ajouté beaucoup d’œuf et de sirop de mizuame, puis je l’ai fait cuire doucement pour qu’elle reste moelleuse. Ça devrait être bon.

— Vraiment ? répondit Jinya, le visage figé.

Les gâteaux avaient belle allure, mais il avait déjà trop mangé. Leur parfum sucré suffirait presque à le rassasier.

— Beurk, sans moi, dit Somegorou sans même se retourner.

Jinya aurait bien voulu décliner lui aussi, mais il avait promis d’aider. Par fierté, il décida d’aller jusqu’au bout. Il prit un gâteau, se força à le porter à sa bouche et le goûta.

— Hmm…

La texture était agréable. La pâte de blé, plus aérée que lors des précédents essais, devait sa légèreté à l’ajout d’œuf et de mizuame. La pâte de haricots, douce et équilibrée, laissait un goût agréable en bouche.

— C’est bon, dit-il simplement.

Il n’essayait même pas d’analyser : les mots lui échappèrent naturellement.

Nomari en goûta un à son tour, et l’expression de son visage suffit à révéler son avis.

— A…alors ? Qu’en pensez-vous, Nomari-san ? demanda Toyoshige, les yeux pleins d’espoir.

— C’est bon. Oui, c’est le meilleur jusqu’ici.

Submergé par l’émotion, Toyoshige se mit à trembler.

Nomari continua de manger, visiblement conquise. En la voyant si heureuse, Jinya eut une pensée qui fit naître un léger sourire sur ses lèvres.

— Mihashi-san, je crois que c’est celui-là.

Toyoshige semblait avoir eu la même révélation. Un large sourire victorieux éclairait déjà son visage. À voix basse, il murmura :

— Je vois. Alors, ça…

Jinya hocha la tête et acheva sa phrase.

— …c’est le pain aux haricots rouges.

— Oooh…

— Oui…

Évidemment, ils étaient complètement à côté de la plaque. Une pâte de blé cuite avec des œufs et du sirop de mizuame donnait un castella, pas du pain.  C’était bien loin du véritable pain aux haricots rouges, mais aucun d’eux n’en savait assez pour le comprendre. Nomari hocha la tête à son tour, approuvant les deux adultes sans se douter de leur erreur.

— Merci, Kadono-san, Nomari-chan… et le vieux là-bas, allongé. Grâce à vous, j’ai réussi à faire du pain aux haricots rouges !

Les yeux de Toyoshige s’humidifièrent d’émotion, sans qu’il réalise qu’il se trompait complètement.

Jinya, qui s’était contenté de goûter, avait tout de même le sentiment d’avoir bien travaillé. Il tapota l’épaule de Toyoshige et dit :

— Ne sois pas si modeste. C’est ta réussite, Mihashi-san. Sois-en fier.

— Oui, félicitations, Mihashi-san, ajouta Nomari.

Pour rappel, ce qu’il avait créé n’avait absolument rien à voir avec du pain aux haricots rouges.

— Non, je n’y serais pas arrivé sans vous. Oh, d’ailleurs, j’aimerais vous demander encore un petit service, dit Toyoshige en se grattant la joue d’un air gêné.

Heureux de ce succès collectif, Jinya lui adressa un regard bienveillant et répondit :

— Bien sûr.

— Puisqu’on a tous travaillé dessus, j’aimerais que vous m’aidiez à lui trouver un nom. Tu as une idée, Kadono-san ?

— Voyons voir… laisse-moi réfléchir.

L’ambiance légère du moment le poussa à agir d’une manière peu commune pour lui.

Oubliant sa réserve habituelle, il donna à la nouvelle douceur un nom qui devait durer…

 

***

Août 2009.

Retour à l’époque moderne.

Kadono Jinya, Azusaya Kaoru et Miyaka étaient assis autour d’une table, chez cette dernière, dans l’enceinte du sanctuaire Jinta, à Kadono.

Nous étions le 25 août. Les vacances d’été touchaient à leur fin, et tous trois s’étaient réunis ce matin-là dans la chambre de Miyaka pour terminer leurs devoirs de vacances.

— Alors, ça avance, Jin-kun ?

— Pas trop mal. Mais l’anglais, j’y comprends rien.

— Je t’aide si tu m’aides pour le japonais classique.

— Marché conclu. J’ai déjà lu la plupart des textes originaux, de toute façon.

— Ah ah, je m’en doutais !

Le regard empli de curiosité, Miyaka observait ses deux amis discuter. Leurs vacances d’été avaient été bien remplies : ils étaient allés à la plage, avaient assisté à un festival, fait une virée shopping entre filles, passé du temps avec leurs camarades près de la gare, et bien sûr… il y avait aussi eu toutes ces histoires occultes.

Avec tout ce qu’ils avaient vécu, il n’était guère surprenant que Miyaka se soit rapprochée non seulement de Jinya, mais aussi de plusieurs de ses camarades de classe. Par extension, rien d’étonnant non plus à ce que Kaoru et Jinya se soient rapprochés à leur tour, mais au point qu’elle se mette soudain à l’appeler par un surnom, « Jin-kun » ?

— Hé, Asagao…

— Oui, montre-moi.

Jinya avait toujours été d’une douceur particulière envers Kaoru, mais ces derniers temps, la distance entre eux semblait s’être encore réduite. Il avait même trouvé un surnom pour elle : « Asagao ».

Et d’où venait ce surnom, au juste ? En quoi « Asagao » pouvait-il être un diminutif de « Kaoru » ? Kaoru, pourtant, ne semblait pas s’en offusquer. Qu’avait-il bien pu se passer entre eux ?

Miyaka continua de les observer jusqu’à ce que Jinya lève soudain les yeux et croise son regard. Leurs yeux se fixèrent quelques secondes, puis, parfaitement calme, il demanda :

— Qu’y a-t-il ? Tu ne bosses pas ?

Et à ton avis, pourquoi je suis distraite ? pensa-t-elle. Elle songea à le dire tout haut, mais s’en abstint. Ce serait un peu injuste.

— Tsk.

Agacée par son air impassible, elle lui lança sa gomme.

— Qu’est-ce que tu fais ?

Elle le toucha à la tête avec un petit bruit sec. Il ne tenta même pas de l’éviter, ni de l’arrêter. Se sentant traitée comme une enfant, Miyaka en fut encore plus irritée.

— C’est bon, j’ai fini ! ouf, s’exclama Kaoru en posant son porte-mine sur la table avant de s’étirer.

Jinya poussa un long soupir.

— Je viens de finir aussi.

À présent que Miyaka avait terminé elle aussi, les trois purent enfin ranger leurs devoirs.

Ils purent souffler un peu. Miyaka se souvint soudainement que sa mère leur avait préparé quelques pâtisseries.

— Pfiou, je suis épuisée. Mais au moins, maintenant, on va enfin pouvoir s’amuser sans penser aux devoirs, dit Kaoru.

— Oui. Attendez-moi une seconde, je vais chercher du thé.

Miyaka se rendit à la cuisine et revint avec du thé vert et quelques friandises disposés sur un plateau. À son retour, Kaoru était affalée, complètement détendue, et Jinya la regardait avec un sourire attendri.

Les deux étaient proches, sans doute, mais leur lien ressemblait davantage à celui d’un frère et d’une sœur… ou plutôt d’un grand-père et de sa petite-fille, vu leur âge.

— Oh, te revoilà.

— Kaoru, arrête de traîner par terre comme ça. C’est salissant, et tu as des invités.

— Mais je suis fatiguéeee…

Malgré leur proximité, Kaoru ne semblait pas voir Jinya comme un homme, ou peut-être qu’elle s’en moquait simplement. Elle se roulait sur le sol en jupe, sans même réagir aux remarques de Miyaka.

Sérieusement ? Et si sa culotte se voyait ?

Miyaka posa le plateau sur la table et la releva d’un geste.

— Bref, ma mère est allée en voyage à Kyoto et elle nous a rapporté des douceurs. Ça s’appelle « pain aux haricots rouges de Nomari », et ça vient d’une boutique du nom de Mihashiya.

— Oh, j’en ai entendu parler ! Ils en ont parlé à la télé ! s’exclama Kaoru, le visage illuminé.

Elle avait une véritable passion pour le sucré. À l’inverse, Jinya fronça les sourcils plus que d’habitude.

— Qu’est-ce qu’il y a ? Tu n’aimes pas ça ? demanda Miyaka.

— Non, ce n’est pas ça…, répondit-il.

Lorsqu’ils avaient pris le thé un peu plus tôt, il lui avait raconté qu’autrefois, le sucre était un ingrédient rare et précieux, si bien qu’il n’en mangeait presque jamais. C’était justement pour cela qu’il appréciait tant les gâteaux aujourd’hui. Miyaka pensait qu’il serait ravi, quelle que soit la friandise, mais son expression inhabituellement fermée la troubla.

Curieuse, elle haussa les épaules et disposa le thé et les gâteaux.

— Allez, servez-vous.

— J’y vais ! lança Kaoru en croquant goulûment dans sa part.

Le pain aux haricots rouges de Nomari était une spécialité célèbre d’une confiserie de Kyoto appelée Mihashiya. Une pâte de castella moelleuse enveloppait une garniture de pâte de haricots rouges. La douceur du gâteau se mariait parfaitement au goût léger des azuki, ce qui expliquait son succès.

— Mmm, trop bon, fit Kaoru.

— Oui. Mais ce n’est pas vraiment du pain aux haricots rouges, non ? dit Miyaka. — D’ailleurs, ce n’est pas du pain. Alors pourquoi ce nom ?

Contre toute attente, Jinya prit la parole.

— C’est une pâte de blé farcie de pâte de haricots rouges. On peut dire que ça reste proche d’un pain aux haricots rouges, non ?

— C’est un peu tiré par les cheveux, répondit Miyaka sans trop y réfléchir.

Pour une raison qu’elle ne comprit pas, Jinya grimaça en mordant dans sa part.

Kaoru, en voyant son visage, sembla comprendre quelque chose. Hésitante, elle demanda :

— Dis, Jin-kun… Mihashiya, ce n’était pas le nom de la confiserie à côté de chez toi, autrefois ?

— Hein ? Jinya, tu as vécu à Kyoto ? s’étonna Miyaka.

— Oui, pendant un temps.

C’était une nouvelle pour Miyaka. Mais elle ne s’était jamais permise de fouiller dans son passé, par respect pour sa discrétion. Kaoru, en revanche, assise à côté de lui en classe, était du genre à poser toutes les questions qui lui venaient à l’esprit. Et comme il était toujours indulgent avec elle, il devait répondre sans rechigner. Ils avaient sûrement déjà parlé de son passé à maintes reprises.

— Attends, fit Kaoru, — est-ce que ce pain aux haricots rouges ne serait pas nommé d’après… ?

— Ne dis rien, coupa Jinya.

Le ton était à la fois ferme et las, comme s’il voulait éviter le sujet à tout prix. Miyaka ne comprenait pas pourquoi.

— Mais enfin, pourquoi ça s’appellerait « pain aux haricots rouges de Nomari » sinon ?

— Épargne-moi, je t’en prie…

Il baissa la tête, accablé.

Un moment d’exaltation pouvait parfois mener à une honte éternelle.

Nul n’aurait pu imaginer que la pâtisserie née ce jour-là par pur hasard traverserait plus d’un siècle.

Sous le regard amusé de Kaoru et celui, perplexe, de Miyaka, Jinya ne put qu’incliner la tête de désespoir.

 

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