THE TOO-PERFECT SAINT T3 - bonus 2

La robe de mariée

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Traduction : Calumi
Correction : Opale
Harmonisation : Raitei

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Toutes sortes de malheurs avaient frappé Girtonia depuis qu’il avait commis l’erreur insensée de vendre la plus grande Sainte de tous les temps au royaume voisin de Parnacorta. La grandeur de Sainte Philia Adenauer était devenue éclatante lors de l’approche du Royaume démoniaque. Et lorsqu’elle avait sauvé tout le monde de ce sombre destin, le royaume tout entier avait pris conscience de la valeur de cette femme extraordinaire.

Elle avait gagné l’honneur incroyable d’être la deuxième personne de l’histoire à recevoir le titre de Sainte Salvatrice, et elle avait présidé le Sommet des Saintes. Puis elle avait sauvé de nouveau le continent en terrassant le démon Asmodeus, qui avait soumis des femmes douées de talents magiques. Une réussite après l’autre, Philia n’avait cessé de rappeler à Girtonia ce qu’il avait perdu. Le visage empreint de trouble, le prince Fernand, prince héritier de Girtonia, se sentit soulagé de pouvoir se confier un peu.

— Les gens me pressent de convaincre votre sœur de revenir à Girtonia presque tous les jours. Vu à quel point vous êtes proches… vous pourriez sûrement la convaincre, n’est-ce pas ?

Au début, Son Altesse et moi avions commencé à nous rencontrer davantage pour discuter des mesures de reconstruction, entre autres sujets. Mais avant que nous le réalisions, nous déjeunions presque chaque semaine ensemble.

Le repas de ce jour-là était cependant un peu différent. Apparemment, Son Altesse avait quelque chose d’important à me dire avant de régler ses comptes avec l’ancien Archevêque Henry. Mon cœur battait la chamade en attendant qu’il se décide à en parler.

— Vous voulez que je demande à Philia de revenir ? Mais il est déjà bien trop tard ! Je n’ai pas envie qu’elle endure encore tout ça. C’est insensé.

On dit que le plus gros poisson est toujours celui qui nous échappe. Mais Philia n’était pas un poisson : elle ressemblait plutôt à une baleine…

Ou à un dragon. Aucun des fonctionnaires girtoniens qui avaient fini par reconnaître sa grandeur n’arrivait à l’oublier. Bien que la plupart des officiels qui avaient collaboré avec Julius eussent déjà été punis, même les innocents restés en poste gardaient un optimisme naïf : ils croyaient que le royaume pourrait s’en sortir sans Philia.

Pour eux, il y avait encore deux Saintes capables d’user de magie spécialisée comme le Grand Cercle de Purification : Mère et moi. Ils se disaient que, tant que nous étions là, Girtonia tiendrait le coup. Mais il ne fallut pas longtemps pour qu’ils changent d’avis, dès qu’ils réalisèrent combien les exploits de Philia dépassaient ce que nous pouvions accomplir.

— Vous avez raison, dit le prince Fernand. — Nous devons tout faire pour que ce royaume prospère par lui-même. La faute d’avoir stupidement cédé Philia à Parnacorta ne repose pas seulement sur Julius, mais sur tous ceux qui ont fermé les yeux et n’ont rien fait pour l’empêcher.

— Votre Altesse…

Le prince Fernand vida son verre de vin d’un trait, puis rit avec une amertume résignée.

— Et parmi tous, c’est moi qui porte la plus grande faute. J’avais peur de mon frère. Si vous n’aviez pas ravivé en moi la flamme, je ne me serais pas mis en mouvement. Il n’y a pas d’excuse à ma faiblesse.

Plus le prince Fernand travaillait avec ardeur, plus il se reprochait de ne pas s’être relevé plus tôt. Au fond, il n’avait pas changé : il restait un pessimiste.

— Vous n’avez pas à vous sentir coupable.

— Oh ?

— Votre Altesse, vous avez réfléchi à vos erreurs passées et vous avez avancé. Vous vous êtes donné corps et âme pour remettre Girtonia sur la bonne voie.

— Non, mais… commença le prince Fernand.

— Ne pensez-vous pas que les regrets sont une perte de temps ? Regardez plutôt tout le chemin parcouru.

J’avais toujours pensé qu’il était inutile de s’attarder sur les: « J’aurais dû faire autrement ». Bien plus pratique était de songer à ce qu’il fallait accomplir ensuite. Son Altesse avait médité sur ses erreurs passées, et cela se voyait dans ses actes. Elle pouvait en être fier… du moins, j’aimerais qu’elle s’en persuade.

— Vous êtes formidable, dit Son Altesse avec un sourire. — Savez-vous seulement à quel point ? Non, sérieusement, vous êtes vraiment incroyable.

— Euh, que voulez-vous dire exactement ?

Je n’arrivais pas à comprendre ce qu’il voulait exprimer avec un tel compliment soudain. Pourquoi me complimenter maintenant ? Et s’il voulait m’honorer, pourquoi ne pas ajouter quelque chose de précis ?

— Bien sûr que je le pense, répondit-il. — Mia, vos paroles me donnent de la force. Je serais prêt à tout pour vous.

— Ah, vraiment ? Si vous aimez tant que cela mes paroles, je pourrais vous encourager chaque jour.

— Vraiment ? Ce serait merveilleux. Savez-vous seulement à quel point cela me rendrait heureux ?

— Quoi ?!

Nous nous exclamâmes tous deux en même temps. Jusqu’ici, nous nous étions adressé la parole avec distance. À présent, nous parlions en ayant encore les fourchettes et couteaux en main.

Quel genre de conversation tenions-nous ? Était-ce normal ?
Avais-je dit quelque chose de terriblement gênant pour le prince Fernand ? Je n’avais pas voulu insinuer quoi que ce fût de déplacé. Mais quand Son Altesse répondit qu’elle aimerait que je l’encourage chaque jour, l’atmosphère s’était changée en un drôle de malaise.

— Je suis désolée, Votre Altesse. Je n’ai vraiment pas voulu dire cela dans ce sens-là !

— Mais, vous savez… Quand vous avez dit que vous ne le pensiez pas, qu’est-ce que vous vouliez dire par là ? Attendez, non, c’est idiot de vous le demander…

Encore une fois, le silence tomba entre nous. C’était si gênant. Je voulais juste faire sourire Son Altesse. Pourquoi fallait-il que cela tourne ainsi ? Ah, quelle frustration ! Ma patience touche à sa fin.

Allons, prince Fernand, faites quelque chose pour dissiper cette atmosphère pesante !

— Alors, Mia. Au sujet de ce dont nous parlions plus tôt…

— Hein ? Vous voulez vraiment revenir là-dessus ?!

— J-Je suis désolé, ce n’est pas ça. Pourriez-vous simplement m’écouter attentivement ?

Je ne m’attendais pas à ce que Son Altesse ressorte de vieilles histoires. Voulait-elle rendre la situation encore plus gênante qu’elle ne l’était déjà ? Je ne savais plus du tout ce qu’elle avait en tête.

Quoi qu’il en soit, je répondis :

— Très bien. Je vous écoute. Allez-y.

— Merci. Cela me soulage. Alors, je me lance…

Le prince Fernand inspira profondément, ses yeux fixés dans les miens. Sa nervosité était palpable. Mon propre cœur battait à tout rompre, tant j’étais tendue.

— Mia Adenauer, je veux puiser ma force en vous chaque jour. Pour la prospérité de notre royaume, et pour que notre peuple ne manque de rien, je vous veux à mes côtés.

— Hein ? C’était… une demande en mariage ?

— Euh… Oui, c’en était une. Était-ce déplacé ?

— Pas du tout. Je ne m’y attendais pas, alors j’ai été surprise, mais c’était magnifique.

La proposition du prince Fernand fut si soudaine que mon esprit avait du mal à suivre. Il venait donc de me demander en mariage. Rien de plus, rien de moins. Et pourtant, je dus me répéter sans cesse ce qui venait de se passer pour parvenir à le comprendre. J’avais l’impression que mon visage brûlait. Je m’étais préparée à entendre quelque chose d’important de la part de Son Altesse, mais une telle déclaration m’avait prise de court.

Alors que je reprenais tant bien que mal contenance, le prince Fernand sortit de sa poche un petit écrin, se mit à genoux et me présenta une bague.

— Je voudrais que vous acceptiez ceci.

— Une bague ? Alors, c’était cela le sujet si important dont vous vouliez parler…

D’après son attitude, Son Altesse avait soigneusement préparé ce moment. Après tout, elle m’avait prévenue qu’elle avait quelque chose à m’annoncer. Mais le fait qu’elle me fasse sa demande aussi spontanément me troubla.

— En réalité, j’ai acheté cette bague il y a un mois déjà… mais je n’avais pas eu le courage de vous la donner avant aujourd’hui. J’étais impatient de vous faire ma déclaration. Mais au moment de parler, mes nerfs m’ont trahi, et j’ai complètement oublié le discours que j’avais préparé…

— Votre Altesse…

— Mais j’ai senti que si je ne vous demandais pas en mariage maintenant, je retomberais dans mes anciennes habitudes. Alors, en fin de compte, j’ai décidé d’improviser.

— Eh bien, cela explique tout.

Comment dire ? La demande était typique de Son Altesse. Cet homme se mettait sans cesse en danger, quoi qu’il arrive.

C’était moi qui l’avais tiré de l’ombre pour l’entraîner à arrêter Julius lors de l’affaire de ma sœur. Bien que le prince Fernand pût se montrer craintif, il faisait toujours de son mieux pour être fort. Et sans que je m’en rende compte, j’avais fini par trouver cela attendrissant.

— Alors, Mia, si ce n’est pas trop vous demander, puis-je recevoir votre réponse… ?

— U-Une réponse ? D’accord. Euh… Promettez-moi seulement de ne pas vous plaindre chaque jour de mes sermons, d’accord ?

— Bien sûr que non ! Vos paroles me rendent heureux, après tout. Et en retour, je vous jure de vous rendre heureuse.

Son Altesse me sourit en glissant l’anneau à mon doigt, tandis que je l’acceptais avec hésitation.

Philia, j’ai à présent une raison de t’inviter à rentrer chez toi.

Bientôt, je partirais assister au mariage de ma sœur, et j’y prévoyais d’inviter Philia à notre propre noce.

Quelle serait sa réaction à l’annonce ? Je brûlais d’impatience de voir l’expression sur son visage.

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